Le soleil matinal se versait dans la salle de travail par la fenêtre. Il ne s'était pas levé depuis longtemps, mais l'aiguille des heures de l'horloge à pendule dans le coin de la pièce rapprochait déjà le douze. Tout à fait habituel pour un tel jour d'hiver, proche du solstice. Louis de Novillac avait quitté le manoir peu de temps après le petit déjeuner, et laissait son apprenti faire quelques exercices sur l'éclairage d'un hall selon l'emplacement et la forme des fenêtres. Planplan manipulait soigneusement et prudemment équerre et compas, traçant divers plans et cherchant l'équilibre entre esthétique et pratique.

Le jeune garçon était très concentré sur son exercice, ses grands yeux violets ne quittant pas la feuille devant lui. Parfois il faisant déplacer des plus vieux plans par magie de l'étagère à la table, histoire de ne pas avoir besoin de se lever. Planplan était très ordonné et savait où était tout était rangé. Là, il récupéra une feuille où il avait tracé diverses rosaces. Planplan appréciait beaucoup les figures qu'on ne traçait qu'avec un compas, il trouvait une harmonie réconfortante à travers ces arcs de cercles emmêlés. Il utilisa l'une des rosaces comme référence pour ajouter une touche finale à la fenêtre principale du hall qu'il planifiait, quand un serviteur entra dans la salle pour lui informer qu'un visiteur sonnait à la porte.

Planplan, étant très concentré, n'entendit pas la première fois.

- Je n'ai pas entendu. Pourriez vous répéter ?

- Un visiteur sonne à la porte.

Un visiteur... Selon le planning, où ce dont Planplan en retenait, il ne devrait pas y en avoir ce jour là. Peu importe s'il était question de faille de sa mémoire, ou de client arrivé en avance ou en retard, l'apprenti se rappela des instructions de son maître à propos des visiteurs lors de son absence. Il allait informer le visiteur de l'absence de son maître, et demander aux serviteurs de servir l'invité pendant qu'il attendait le retour de Monsieur de Novillac. Planplan remercia donc le serviteur et acheva son arc de cercle (il détestait faire une pause lors de son travail en laissant de telles choses à moitié abouties), puis rangea son matériel un minimum avant de descendre. Bien que le visiteur n'entrerait probablement pas dans la salle de travail, laisser les choses en désordre en quittant la pièce déconfortait Planplan.

Planplan ouvrit lentement la porte et observa l'homme en question. Il évalua rapidement le style et la palette de couleurs de la tenue, mais ne fit pas de remarque sur le manque de boue, et n'en tira donc pas de conclusion - Planplan passait ses journées à l'intérieur, il n'avait pas assez d'expérience dans le monde extérieur pour cela.

- Bonjour monsieur et bienvenue au manoir de Novillac. Je suis désolé de vous informer que le maître n'est actuellement pas disponible. Je vous prie par contre de rentrer et de prendre un thé en attendant son retour.

Il prononça toute la phrase d'une traite fluide et sans hésitations, la tête légèrement levée pour bien regarder le visiteur dans les yeux comme son maître le lui avait tant répété. 

- Mon maître rentrera avant treize heures si tout se passe comme prévu.

Il était tout à fait normal que l'homme soit de mauvaise humeur, pensa Planplan en laissant l'homme entrer et en fermant la porte derrière lui, surtout si ses plans pour l'après midi étaient désormais en désordre. Le garçon roux mena l'homme dans le salon, où étaient placés plusieurs fauteuils autour d'une table basse. Il se tourna vers le serviteur qui l'avait informé du visiteur.

- Pourriez vous servir du thé pour notre invité, s'il vous plaît ?

Planplan prit donc place dans le fauteuil opposé à celui qu'avait choisi l'invité, les mains sur les cuisses, pendant que le serviteur partit préparer le thé.

- En effet, non, pas encore. Je m'appelle Planplan et je suis l'apprenti de Monsieur de Novillac.

Se présenter, c'était en effet la prochaine étape dans cette procédure. L'invité avait bien fait de le lui rappeler.

- Cela fait deux ans que je suis apprenti.

Planplan répondit d'un ton neutre, et enchaîna sur un court résumé de ce qu'il a appris lors des deux années de son apprentissage. Toujours dans la logique de minimiser son temps perdu, il semblait logique que cet homme chercherait à savoir les capacités de l'apprenti, qui pourrait peut-être servir.

- J'ai 15 ans.

S'il posait cette question, c'était que cet homme reliait l'âge à la maîtrise de la matière. Planplan était en désaccord avec ce point de vue, mais répondit tout de même.

Planplan remercia aussi le serviteur, mais ne but pas directement. Le thé chaud brûlait un peu trop sa language, donc il continua à parler au noble sans même regarder sa boisson.

- Oui, il pourra prendre votre commande.

- Bien sûr. À partit du moment où on a les bases, la pratique est le meilleur moyen de progresser, dit Planplan, toujours fixant son interlocuteur, avec un léger hochement.

- En effet. Plusieurs événements lors des deux dernières années de ma vie m'ont apporté de très bonnes opportunités et des avantages.

Planplan, ayant une écoute attentive, n'oublia pas les premières questions du noble après avoir prononcé sa définition de la chance.

- Je vivais avec mon psychiatre avant d'arriver ici. J'étudiais diverses matières seul par la lecture.

- Mes parents moururent dans un carrosse à cause d'un incident lors de mon enfance. C'est mon psychiatre qui s'est occupé de moi depuis.

Planplan disait la vérité. Pour lui, mentir était difficile. Il avait du mal à trouver une explication fausse mais vraisemblable sous une contrainte de temps. Ici, le temps était bien entendu la patience d'un interlocuteur. Il raconta donc les faits, mais omis tout ce qui pouvait le relier à son passé au palais royal de Sableblanc. Même en omettant seulement, sa voix commençait à être moins ferme, vu qu'il n'avait pas réellement répondu à la question du noble, et il le savait.

Planplan se demanda si le noble avait déduit quelque chose en lisant le trouble de celui ci. Il trouvait l'histoire d'un enfant qui se faisait adopter par un psychiatre bien crédible. Devait il demander à l'homme ce qu'il pensait de Planplan ? Non, cela devrait rendre le rendre encore plus suspect.

Après une pause, où Planplan réfléchissait en continuant à fixer l'homme sans toucher à son thé, il reprit enfin la parole, mais sans une parfaite certitude dans le ton de sa voix.

- Je ne vois pas en quoi cela aurait un effet négatif sur mes études. Mes études me permettent la concentration et l'oubli de souvenirs négatifs.

Planplan, ne voyant pas de réponse à la dernière interjection du nobliau, se leva directement pour aller ouvrir la porte, en espérant bien que ce soit son maître.

- Bien sûr.

Planplan prit donc la moitié du papier. Il n'était pas costaud et avait une faible constitution, mais fit tout de même le mieux qu'il pouvait sans le risque de se déséquilibrer et de tomber à terre. L'apprenti informa son maître de l'homme qui attendait pour passer commande.

- Maître, un client est arrivé lors de votre absence. Il attend dans le salon.

- Bien sûr.

Son maître trouvera donc le nobliau assis dans un fauteuil, avec la tasse de thé de Planplan en face, toujours pas du tout touchée. Planplan s'occupa donc du matériel avec soin et arrivé devant le bureau, il poussa la porte avec son pied et lâcha un soupir de soulagement quand il pu tout poser sur la table. Il se secoua légèrement les poignets et sortit du bureau, revenant au salon.

Planplan ne reconnu pas du tout le ton de l'excuse. Il trouvait malgré tout un peu étrange qu'un client qui venait poser une commande ne vienne pas préparé, donc avec tous ses documents, surtout étant donné qu'il habitait loin. Cela se voyait clairement sur son visage qu'il était un peu déçu d'être revenu trop tard.

- Bonne chance pour le trajet de retour, alors, il fit un signe de main à ce "Monsieur de Chaufer" pour dire au revoir, et attendit que l'homme parte pour demander les détails de la commande à son maître.

- Oui, tout s'est bien passé. Monsieur de Chaufer a remarqué que j'ai beaucoup de chance d'être votre apprenti.

Planplan résuma la conversation, puis s'intéressa au projet.

- Sera t il nécessaire d'attendre l'arrivée des documents sur son actuel domaine avant de commencer ? Ou avons nous déjà assez d'informations ?

- Il me reste encore une fenêtre. Je vais chercher le plan.

Planplan partit donc chercher l'exercice qu'il était en train de faire avant l'arrivée de Monsieur de Chaufer. La feuille était toujours sur la table, et il prit soigneusement par la main pour montrer à son maître.

(Ca me dérange pas de juste faire du RP sur des plans qui n'a pas trop d'importance à l'histoire! C'est selon si toi tu veux le faire, ou si tu trouves ça trop barbant)